Cycle interne de l'eau: le mod¨¨le de "pluie" du manteau
Communiqu¨¦ de presse.
De l'eau est continuellement inject¨¦e dans le manteau aux zones de subduction par l'interm¨¦diaire de min¨¦raux hydrat¨¦s. Le flux d'hydrog¨¨ne qui parvient effectivement dans le manteau profond n'est pas contraint tr¨¨s pr¨¦cis¨¦ment, mais il pourrait correspondre au volume total des oc¨¦ans ¨¤ la surface de la Terre tous les 2 ¨¤ 5 milliards d'ann¨¦es. A l'inverse, la quantit¨¦ d'eau extraite du manteau aux rides oc¨¦aniques est 3 ¨¤ 8 fois plus faible selon les estimations; comme c'est la source principale reconnue d'eau du manteau, cela pose le probl¨¨me de la continuit¨¦ du cycle interne de l'eau.
La zone hydrat¨¦e la mieux mise en ¨¦vidence par la sismologie est la fine couche partiellement fondue au-dessus de la discontinuit¨¦ sismique ¨¤ 410 km de profondeur. Cette couche, commun¨¦ment appel¨¦e LVL pour low-velocity layer, est expliqu¨¦e par une transformation de phase entre la wadsleyite en olivine lors de la remont¨¦e du manteau au-dessus de 410 km. La wadsleyite, qui peut contenir une assez grande quantit¨¦ d'hydrog¨¨ne dans sa structure, se transforme en olivine accompagn¨¦e d'un liquide riche en eau (~6.5 poids% de H2O), si la teneur globale en eau est sup¨¦rieure au niveau de saturation de l'olivine. Des ¨¦tudes ant¨¦rieures ont propos¨¦ que la LVL intervienne dans le cycle interne de l'eau comme un puits qui retiendrait ind¨¦finiment l'eau subduite et transf¨¦r¨¦e ¨¤ la zone de transition. En effet, on s¡¯attend ¨¤ ce que le liquide pr¨¦sent dans cette couche soit l¨¦g¨¨rement plus dense que le manteau ¨¤ olivine ¨¤ 410 km de profondeur, ¨¤ cause de sa composition assez particuli¨¨re et d'un taux de FeO ¨¦lev¨¦ (~12.5%).
Dans cette nouvelle ¨¦tude, les auteurs proposent que la LVL soit au contraire la source d'un liquide riche en eau qui remontrait vers la surface de la Terre. Les arguments sont multiples. Le mod¨¨le permettrait tout d'abord d'¨¦quilibrer le cycle interne de l'eau. Il y aurait une parfaite ¨¦quivalence entre le flux d'eau p¨¦n¨¦trant le manteau aux zones de subduction, l'eau impliqu¨¦e dans la formation du liquide dans la LVL, et la quantit¨¦ d'eau pr¨¦sente dans le liquide remontant continuellement dans le manteau. En s'appuyant sur les ¨¦tudes ant¨¦rieures, les auteurs d¨¦montrent que ce liquide devient facilement moins dense que le manteau ¨¤ la limite sup¨¦rieure de la LVL, dans le cas d'une anomalie positive de temp¨¦rature, par l'accumulation d'eau, ou par l'¨¦paississement de la LVL. La remont¨¦e du liquide riche en eau issu de la LVL pourrait ¨ºtre ¨¤ l'origine d'observations g¨¦ologiques majeures comme la refertilisation du manteau lithosph¨¦rique et le volcanisme intra-plaque.
Ce nouveau cycle interne permet d'affiner le bilan interne en eau au cours des temps g¨¦ologiques. En effet, la saturation en eau des phases min¨¦rales mises en jeu d¨¦pend de la temp¨¦rature dans le manteau. Ainsi, le manteau sup¨¦rieur (entre la surface et 670 km) contiendrait aujourd'hui l'¨¦quivalent du volume total des oc¨¦ans sur Terre. Une Terre plus chaude dans le pass¨¦ implique une quantit¨¦ d¡¯eau stock¨¦e dans le manteau de ~20% inf¨¦rieure pour une temp¨¦rature 200K plus ¨¦lev¨¦e. Cela signifie que la quantit¨¦ d'eau ¨¤ la surface du globe diminue avec le temps, ¨¤ cause du refroidissement s¨¦culaire du manteau, et ce depuis que la dynamique globale du manteau a permis l'enfouissement d'eau dans le manteau via la subduction, permettant ainsi l'¨¦tablissement du cycle de l'eau interne.Plus d'informations :
"Mantle rain towards the Earth's surface: a model for the internal cycle of water" par Denis Andrault et Nathalie Bolfan-Casanova, PEPI, https://doi.org/10.1016/j.pepi.2021.106815